Comité juridique, 109ème session, (LEG 109) 21-25 mars 2022

Mer Noire et mer d'Azov - Recommandations concernant les certificats d'assurance et autres garanties financières

Le Comité juridique de l'OMI (21-25 mars) a approuvé une circulaire sur les Recommandations concernant les incidences de la situation en mer Noire et en mer d'Azov sur les certificats d'assurance et autres garanties financières (LEG.1/Circ.12).  Cette mesure fait suite à la décision prise par le Conseil de l'OMI lors de sa session extraordinaire (C/ES 35), au début du mois de mars, de demander aux comités de l'OMI d'étudier les moyens d'appuyer les efforts déployés par les États Membres et les organisations observatrices pour aider les gens de mer et les navires de commerce touchés, d'examiner les conséquences de cette situation sur la mise en œuvre des instruments de l'Organisation, de prendre les mesures appropriées et de faire rapport au Conseil.

La circulaire note qu'un certain nombre de traités pertinents de l'OMI relatives à la responsabilité et à l'indemnisation exigent que les États Parties délivre des certificats attestant l'existence d'une assurance ou d'une autre garantie financière qui satisfait aux prescriptions de ces conventions. L'introduction de ces sanctions économiques pourrait, dans certains cas, empêcher les assureurs ou autres fournisseurs de sécurité financière de traiter les demandes d'indemnisation ou faire obstacle au règlement des demandes déposées au titre de ces conventions. 

La circulaire recommande notamment aux États du pavillon ou aux États délivrant des certificats attestant la fourniture d'une assurance par un assureur russe ou un fournisseur de sécurité financière russe doivent vérifier que la couverture répond aux critères énoncés dans la lettre circulaire n° 3464 - qui fournit des recommandations pour l'acceptation de "cartes bleues" ou de documents similaires émanant de compagnies d'assurance pour des traités spécifiques. 

Les États du port qui rencontrent des certificats impliquant des assureurs ou des fournisseurs de garantie financière russes devraient consulter l'État émetteur ou certificateur dont la responsabilité est de s'assurer que l'assurance ou la garantie financière reste adéquate, comme le prévoient les traités pertinents de l'OMI en matière de responsabilité et d'indemnisation.

La circulaire recommande aussi que si un État Partie aux conventions correspondantes a délivré des certificats en vertu de l'article VII de la Convention de 1969 sur la responsabilité civile, de l'article 7 du Protocole CLC de 1992, de l'article 7 de la Convention de 2001 sur les hydrocarbures de soute, de l'article 12 de la Convention de Nairobi de 2007 et de l'article 4bis du Protocole d'Athènes de 2002, l'État ayant délivré le certificat, ou l'autorité qu'il a désignée, doit veiller à annuler le certificat, conformément aux conventions, s'il est informé de la résiliation de l'assurance ou autre garantie financière.

Nouveau sous-point de l'ordre du jour 

Le Comité a accepté d'inscrire un nouvel alinéa consacré aux incidences de la situation en mer Noire et en mer d'Azov sur les transports maritimes et les gens de mer à l'ordre du jour du Comité juridique au titre du point de l'ordre du jour intitulé "Avis et recommandations au sujet de l'application des instruments de l'OMI".

Abandon des gens de mer

Le Comité a pris note des informations provenant de la base de données conjointe OMI/OIT sur les cas d'abandon des gens de mer, qui révèlent que 30 cas d'abandon ont déjà été notifiés au cours des trois premiers mois de 2022. Au cours de l'année civile 2021, un nombre record de 95 nouveaux cas avait été signalé. Parmi ces cas, seuls 31 avaient été résolus. Au cours de l'année civile 2020, le nombre total de cas signalés était de 85. Parmi ces cas, 43 ont été réglés à ce jour. Parmi les cas signalés depuis 2020, 21 étaient dus à la pandémie de COVID-19, ce qui avait encore aggravé la crise liée à la relève des équipages.

Le Comité a exprimé sa profonde inquiétude concernant l'augmentation des cas d'abandon suite à la pandémie de COVID-19, tout en remerciant le Secrétariat de l'OMI, l'Équipe de gestion de crise de l'OMI pour les gens de mer, l'OIT et l'ITF pour l'action qu'ils avaient menée afin de contribuer à résoudre les cas d'abandon.

Le Comité a encouragé les échanges de vues visant à trouver une solution au problème du rapatriement des gens de mer abandonnés et a rappelé aux États Membres de ratifier et de mettre en œuvre efficacement les instruments internationaux pertinents et les amendements y relatifs ; et à signaler les cas d'abandon dans la base de données conjointe OMI/OIT lorsque ceux-ci se produisaient dans leurs ports ou à bord de navires battant leur pavillon. 

Les États du pavillon et les États du port ont été prié instamment de prendre d'autres mesures pour s'assurer de l'existence d'une garantie financière, comme le prescrit la norme A2.5.2 de la la Convention du travail maritime de l'OIT (MLC, 2006), à défaut de quoi ils devraient prendre des dispositions appropriées.

Le Comité a pris note des résultats du Sous-comité de l'application des instruments de l'OMI (III 7) en juillet 2021 en ce qui concernait les questions liées à la garantie financière des gens de mer en cas d'abandon, y compris le fait que dans le rapport d'inspection PSC, des renseignements concernant la période de validité et les coordonnées des prestataires de la garantie financière des certificats d'assurance, comme l'exigent les amendements de 2014 à la MLC, 2006.  Le Sous-comité avait également décidé d'inviter les régimes de PSC à envisager une campagne d'inspections intensive sur la garantie financière dans le contexte des amendements de 2014 à la Convention du travail maritime, 2006.

En outre, le Comité a approuvé, en ce qui concerne le traitement des questions relatives à l'abandon et au traitement équitable des gens de mer, la recommandation du Sous-comité sur l'alignement et l'intégration de mesures en faveur des gens de mer et des pêcheurs, reconnaissant que les gens de mer et les pêcheurs sont souvent confrontés aux mêmes types de problèmes, qui sont devenus encore plus graves dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

Directives à l'intention des autorités de l'État du port sur la manière de traiter les cas d'abandon des gens de mer

Le projet de directives à l'intention des autorités de l'État du port et de l'État du pavillon sur la manière de traiter les cas d'abandon de gens de mer, élaboré par un groupe de travail par correspondance intersessions, a été approuvé par le Comité.

Le texte sera renvoyé au Groupe de travail tripartite mixte OIT/OMI chargé d'identifier et de traiter les questions qui intéressaient les gens de mer ainsi que l'élément humain qui a été établi, afin qu'il se fonde sur ces documents pour élaborer les directives plus avant. (Le groupe de travail mixte devrait se réunir plus tard en 2022).

Traitement équitable des gens de mer

Le Comité a invité à soumettre des propositions concrètes à la prochaine session sur le point de l'ordre du jour "Traitement équitable des gens de mer maintenus en détention car soupçonnés d'avoir commis des délits en mer".

Prévenir les pratiques illicites liées à l'immatriculation frauduleuse et aux registres frauduleux de navires  

Le Comité a poursuivi ses travaux sur les mesures visant à prévenir les pratiques illicites liées à l'immatriculation frauduleuse et aux registres frauduleux de navires, en prenant note de l'adoption par l'Assemblée de l'OMI d'une résolution connexe (résolution A.1162(32)). Ces pratiques illicites compromettent les fondements de l'ensemble du régime réglementaire de l'OMI. 

Le Comité a pris note des communications reçues d'un certain nombre de gouvernements au sujet de registres frauduleux, ainsi que de plusieurs cas de navires utilisant de fausses identités. Le Comité a pris note des préoccupations déjà exprimées par certaines délégations selon lesquelles les données AIS étaient délibérément manipulées et des navires étaient capables de transmettre de fausses données dans le cadre de leur exploitation. Le Comité a décidé d'informer le Comité de la sécurité maritime de cette question, étant donné que ce comité pourrait souhaiter enquêter sur la manière dont des navires sans immatriculation appropriée avaient pu obtenir des numéros MMSI.

Après avoir examiné le rapport du Groupe de travail par correspondance, le Comité a approuvé le mandat d'une étude visant à examiner les questions liées à l'immatriculation frauduleuse et aux registres frauduleux de navires et les mesures possibles pour les prévenir.

Le groupe d'étude serait composé de membres de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), de l'Université maritime mondiale (UMM), de l'Institut de droit maritime international de l'OMI (IMLI) ainsi que d'autres parties intéressées.

Par ailleurs, le Comité a approuvé une définition de "faux document/document contrefait" basée sur le texte élaboré par le Groupe de travail par correspondance. "Faux document/document contrefait" : tout document, sous forme électronique ou en version papier, qui est : .1 contrefait ou falsifié de sorte à obtenir ou à délivrer un certificat d'immatriculation de navire ; .2 un certificat d'immatriculation de navire contrefait ou falsifié; ou .3 sciemment délivré sur la base d'un certificat d'immatriculation de navire contrefait ou falsifié."

Un exposé par IHS Markit/S&P Global (entité désignée pour les numéros OMI et les chiffres de tonnage) sur leurs travaux concernant l'immatriculation frauduleuse et les registres frauduleux de navires a eu lieu le jeudi 24 mars, en marge du Comité juridique. L'exposé peut être consulté ici.

Navires de surface autonomes

Suite à l'achèvement par le Comité de l'exercice de définition réglementaire concernant les navires de surface autonomes (télécharger ici), le Comité a décidé d'inscrire un nouveau résultat au programme de travail sur les "Mesures visant à traiter la question de l'exploitation des navires de surface autonomes (MASS) dans les instruments relevant de la compétence du Comité juridique" pour la période 2022-2023, et plus tard à l'agenda biennal pour la période 2024-2025, en fixant à 2025 l'échéance des travaux.

Le Comité a invité les délégations à soumettre au LEG 110 (qui se tiendra en 2023) des propositions concrètes concernant la portée du nouveau résultat et un projet de feuille de route qui permette aux différentes parties prenantes de s'entendre sur les mesures que le Comité devrait prendre.

Le Comité a noté que l'élément humain devrait être un aspect important à prendre en compte dans la réalisation de ce résultat, et que les navires de surface autonomes devraient être exploités conformément au cadre juridique défini par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

Le Comité a approuvé la constitution pour le Comité de la sécurité maritime, le Comité juridique et le Comité de la simplification des formalités d'un groupe de travail mixte MSC/LEG/FAL sur les navires de surface autonomes en tant que mécanisme transversal pour traiter les questions communes hautement prioritaires qui ont été recensées lors des exercices de définition réglementaire menés par les trois comités en ce qui concerne l'utilisation de navires de surface autonomes. Le groupe de travail mixte sera chargé d'examiner les questions communes identifiées par les trois comités ; et présenter ses avis aux comités après chaque réunion." (La constitution du groupe de travail mixte doit être approuvée par le FAL et le MSC).

Promouvoir l'entrée en vigueur de la Convention SNPD de 2010

Le Comité s'est félicité de la récente adhésion de l'Estonie à la Convention SNPD de 2010, le principal traité de compensation de l'OMI couvrant le transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses par les navires. Le Comité a noté qu'il suffisait que six autres États ayant le volume requis de cargaisons donnant lieu à contribution ratifient le Protocole SNPD de 2010 ou y adhèrent pour que la Convention entre en vigueur, et que, partant, sa date d'entrée en vigueur s'était considérablement rapprochée

Les délégations belge et néerlandaise ont communiqué des renseignements sur les progrès que leurs pays avaient accomplis en vue d'adopter une législation nationale, ce qui leur permettrait de ratifier le Protocole SNPD de 2010 en même temps que l'Allemagne. La délégation française a confirmé qu'elle atteindrait vraisemblablement l'objectif qu'elle s'était fixé, qui était de ratifier le Protocole SNPD de 2010 en 2023. En outre, la délégation philippine a informé le Comité qu'elle avait presque achevé le processus de ratification du Protocole SNPD de 2010.

Lorsqu'il sera en vigueur, le traité prévoira un régime de responsabilité et d'indemnisation pour les dommages causés par les cargaisons SNPD transportées par mer, y compris les hydrocarbures et les produits chimiques, et couvrira non seulement les dommages de pollution, mais aussi les risques d'incendie et d'explosion, y compris pour mort ou lésions corporelles ainsi que la perte d'un bien, ou un dommage causé à un bien. Un Fonds SNPD sera créé, afin de verser des indemnités une fois que la responsabilité du propriétaire du navire est épuisée. Ce Fonds sera financé par les contributions versées après l'incident par les destinataires des cargaisons SNPD.

Afin d'appuyer les travaux menés par les États Membres pour favoriser la ratification du Protocole par de nouveaux États, le Canada, en collaboration avec les Secrétariats de l'OMI et des FIPOL, organisera un atelier sur la Convention SNPD à la fin de l'année 2022.

Élaboration d'un manuel des demandes d'indemnisation au titre de la Convention de 2001 sur les hydrocarbures de soute

Le Comité a examiné les progrès réalisés par un groupe informel chargé d'élaborer un manuel des demandes d'indemnisation au titre de la Convention de 2001 sur les hydrocarbures de soute et a créé un groupe intersessions à distance qui travaillerait par correspondance afin d'établir le texte définitif et examiner comment il devrait être adopté.

Le Comité a encouragé les parties prenantes, et en particulier les représentantes et représentants des petits États insulaires en développement et des pays les moins avancés, à participer activement aux travaux intersessions afin que les résultats de ces derniers soient représentatifs de l'ensemble des Membres de l'Organisation. Ceci est particulièrement important pour les victimes des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute qui ont besoin d'être guidées sur la procédure à suivre pour obtenir une indemnisation rapide. La Convention de 2001 sur les hydrocarbures de soute a été adoptée pour garantir une indemnisation suffisante, prompte et efficace aux personnes subissant des dommages causés par des déversements d'hydrocarbures transportés comme combustible dans les soutes des navires.

Mesures visant à évaluer s'il est nécessaire de modifier les limites de responsabilité

Le Comité a discuté des propositions visant à élaborer des méthodes visant à évaluer s'il était nécessaire de modifier les limites de responsabilité dans un certain nombre de traités en matière de responsabilité et d'indemnisation et a constitué un Groupe de travail par correspondance intersessions chargé d'élaborer une liste de principes et de questions de principe, sur lesquels le Comité devra se prononcer et de commencer à définir les éléments qu'il faudrait inclure dans le projet de méthode. Les travaux seront axés d'abord sur Convention de 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes, telle que modifiée par le Protocole de 1996 (Protocole LLMC de 1996)

Mise en œuvre et application des conventions de l'OMI relatives à la responsabilité et à l'indemnisation

Le Comité a approuvé l'inscription d'un nouveau résultat concernant l'élaboration de recommandations visant à assurer la mise en œuvre et l'application correctes des conventions de l'OMI relatives à la responsabilité et à l'indemnisation.

Prix du meilleur mémoire décerné par le Secrétaire général

Le Comité a félicité M. Si Thu Aung (Myanmar), étudiant en maîtrise à l'Institut de droit maritime international de l'OMI, pour son mémoire intitulé "Overlapping Rights and Jurisdiction in the Grey Area : The Bay of Bengal Experience". Ce mémoire avait été récompensé par le Prix du meilleur mémoire de l'année universitaire 2020-2021, décerné par le Secrétaire général de l'OMI.