Comité juridique, 111ème session (LEG 111), 22-26 avril 2024

Le Comité juridique s'est réuni en présentiel, pour sa 111ème session, au Siège de l'OMI à Londres (avec une participation hybride), du 22 au 26 avril 2024.  Le Comité traite de toutes les questions juridiques relevant de l'OMI, y compris les questions relatives à la responsabilité et à l'indemnisation, au traitement équitable des gens de mer et à l'immatriculation frauduleuse des navires. La session s'est déroulée sous la présidence de Mme Gillian Grant (Canada).  

Points forts du LEG 111

  1. Version définitive des directives sur le traitement équitable des gens de mer détenus car soupçonnés d'avoir commis des délits en mer
  2. Constitution d'une nouvelle équipe spéciale chargée d'examiner la base de données sur les abandons
  3. Immatriculation frauduleuse et registres frauduleux de navires - poursuite des travaux sur la diligence requise
  4. Nouveau résultat à élaborer sur des directives ou de meilleures pratiques en matière d'immatriculation des navires 
  5. Approbation des Directives révisées concernant la reconnaissance des compagnies d'assurance et des certificats d'assurance
  6. Approbation d'une nouvelle brochure de renseignements sur la Convention d'Athènes 
  7. Approbation des mesures visant à évaluer s'il est nécessaire de modifier les limites de responsabilité
  8. Approbation d'une feuille de route sur les travaux du Comité juridique relatives aux navires de surface autonomes 
  9. Facilitation de l'entrée en vigueur du Protocole SNPD de 2010  
  10. Piraterie et vols à main armée  

Directives sur le traitement équitable des gens de mer détenus car soupçonnés d'avoir commis des délits en mer 

Le Comité a mis au point la version définitive des Directives sur le traitement équitable des gens de mer détenus car soupçonnés d'avoir commis des délits en mer. Elles doivent être appliquées dans les cas où des gens de mer pourraient être détenus dans une juridiction autre que celle de la nationalité des gens de mer soupçonnés d'avoir commis des délits dans le cadre de leur emploi à bord d'un navire.

Elles ont pour objet de faire en sorte que les gens de mer bénéficient d'un traitement équitable pendant l'instruction et la détention par les autorités publiques et que la détention ne dure pas plus longtemps que ce qui est nécessaire, conformément à la législation de l'État du port et à celle de l'État côtier. Les Directives s'adressent aux États du port, aux États du pavillon, aux États côtiers, à l'État dont le marin est ressortissant, aux propriétaires de navire et aux gens de mer.

La version définitive des directives sera soumise comme document de base au Groupe de travail tripartite mixte OIT/OMI chargé d'identifier et de traiter les questions relatives aux gens de mer et à l'élément humain pour être affinées. Le Groupe de travail mixte soumettra ensuite les Directives au Comité juridique et aux organes directeurs de l'OIT pour approbation.

Constitution d'une nouvelle équipe spéciale chargée d'examiner la base de données sur les abandons 

L'abandon des gens de mer se produit lorsque les propriétaires de navires ne remplissent pas leurs obligations envers les gens de mer en ce qui concerne le rapatriement en temps voulu, le paiement des salaires impayés, voire la fourniture de produits de première nécessité tels que la nourriture, l'hébergement et les soins médicaux.  

Le Comité a noté l'augmentation alarmante du nombre de cas d'abandon signalés via la base de données OMI/OIT sur les abandons, y compris un nombre considérable de cas non résolus. En 2023, 142 nouveaux cas ont été signalés, contre 109 incidents en 2022, 95 en 2021 et 85 cas en 2020. Auparavant, entre 40 et 55 incidents avaient été signalés chaque année entre 2017 et 2019, alors que 12 à 19 cas avaient été signalés par an entre 2011 et 2016.  Au cours des quatre premiers mois de 2024, 100 autres cas ont été signalés.  Il est donc probable que les chiffres dépassent le nombre record de cas d'abandon signalés l'année dernière.  

Le Comité est convenu que la communication de renseignements en temps utile est essentielle pour résoudre les cas. Les États du pavillon et les États du port jouaient un rôle important dans la vérification de la garantie financière en cas d'abandon des gens de mer à bord de leurs navires et dans leurs ports.

Le Comité a créé une nouvelle équipe spéciale chargée d'examiner et de mettre à jour (ou de reconstituer) la base de données commune OIT/OMI sur les abandons, y compris tous les aspects de procédure, de stratégie, financiers et techniques. Créée en 2004, cette base de données contient des renseignements régulièrement mis à jour sur les navires et les gens de mer qui ont été signalés comme abandonnés dans le monde entier. Une mise à niveau du système permettrait d'améliorer la précision des données et les capacités de suivi, et favoriserait une résolution plus rapide des cas d'abandon. 

L'équipe spéciale soumettra un rapport pour plus ample examen au sein du Groupe de travail tripartite mixte OIT/OMI. Le Groupe de travail tripartite mixte procédera à un examen final puis présentera un rapport clair au Conseil d'administration du BIT et au Comité juridique de l'OMI pour qu'ils l'approuvent 

La base de données actualisée soutiendra la mise en œuvre des Directives sur la manière de traiter les cas d'abandon de gens de mer, adoptées lors du LEG 110.

Immatriculation frauduleuse et registres frauduleux de navires - poursuite des travaux sur la diligence requise

Le Comité a décidé de poursuivre ses travaux sur l'immatriculation frauduleuse des navires et l'utilisation frauduleuse du Système de numéros OMI d'identification des navires. Il s'agit notamment d'aborder les mesures à prendre par les administrations des États du pavillon, conformément à l'obligation qui leur incombe d'exercer un contrôle adéquat sur les navires battant leur pavillon. 

Le Comité a constitué de nouveau le Groupe de travail par correspondance sur la diligence requise et le Système de numéros OMI d'identification des navires, afin de continuer de définir et d'élaborer les éléments que l'État du pavillon devrait prendre en compte pour exercer la diligence requise aux fins de l'immatriculation des navires auprès du pavillon d'un État. Il s'agit des navires soumis au système OMI d'attribution d'un numéro d'identification unique aux compagnies et aux propriétaires inscrits. Le Groupe de travail par correspondance rendra compte de l'avancement des travaux au LEG 112.

Proposition d'un nouveau résultat à élaborer sur des directives ou de meilleures pratiques en matière d'immatriculation des navires 

Le Comité a chargé le Groupe de travail par correspondance sur la diligence requise de travailler entre les sessions afin d'élaborer un avant-projet de texte à l'appui de l'inscription d'un nouveau résultat sur l'élaboration de directives ou de meilleures pratiques en matière d'immatriculation des navires, pour examen par le LEG 112.  

Cette mesure fait suite aux recommandations formulées dans le rapport final du Groupe d'étude sur l'immatriculation frauduleuse et les registres frauduleux de navires, qui a été examiné par le Comité. Un groupe d'étude a été constitué au LEG 109 afin qu'il entreprenne une étude approfondie destinée à traiter l'ensemble des problèmes que posaient l'immatriculation frauduleuse et les registres frauduleux de navires et qu'il examine les mesures de prévention et de lutte qui pourraient être prises à cet égard. Il était composé de l'Université maritime mondiale (UMM), de l'Institut de droit maritime international de l'OMI (IMLI) et de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED). 

Outre l'élaboration de directives ou de meilleures pratiques en matière d'immatriculation des navires, qui prévoient des mesures rigoureuses visant à détecter les pratiques frauduleuses touchant l'immatriculation des navires, le rapport final du Groupe d'étude recommande un certain nombre de mesures. Il s'agit notamment de renforcer les outils existants pour lutter contre l'immatriculation frauduleuse des navires ; l'élaboration de procédures harmonisées pour l'immatriculation; combler les lacunes actuelles ; mener des campagnes de sensibilisation ; et améliorer le Système mondial intégré de renseignements maritimes de l'OMI, en particulier la base de données sur les informations relatives aux navires, qui contient des informations sur les navires individuels (numéro OMI, pavillon, etc.) et indique lorsqu'un navire est identifié comme battant faux pavillon ou visé par des sanctions imposées par l'ONU. 

Le Comité a convenu que les recommandations contenues dans le rapport devaient continuer à être prises en considération. 

Approbation des Directives révisées concernant la reconnaissance des compagnies d'assurance et des certificats d'assurance

Le Comité a approuvé la révision des Directives concernant la reconnaissance des compagnies d'assurance, des fournisseurs de garantie financière et de l'International Group of Protection and Indemnity Associations (P & I Clubs) (Lettre circulaire n° 3464).  Les Directives actualisées seront publiées par le biais d'une circulaire du LEG.

Les présentes Directives ont pour objet de fournir aux États qui sont Parties à des conventions portant sur des questions de responsabilité des orientations concernant la reconnaissance des compagnies d'assurance et des certificats d'assurance ou documents similaires émanant des compagnies d'assurance, des fournisseurs de garantie financière et des P&I Clubs, affiliés ou non à l'International Group (IG). Les conventions pertinentes sont les suivantes

  • Convention internationale de 1992 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, telle que modifiée (Convention de 1992 sur la responsabilité civile) ;
  • Convention internationale de 2001 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute (Convention de 2001 sur les hydrocarbures de soute) ;
  • Convention internationale de Nairobi sur l'enlèvement des épaves, 2007 (Convention de Nairobi de 2007) ; et 
  • Convention internationale de 1996 sur la responsabilité et l'indemnisation pour les dommages liés au transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses, telle que modifiée par le Protocole de 2010 à la Convention (Convention SNPD de 2010).

Les Directives révisées comprennent une liste de définitions et une nouvelle section intitulée "Critères d'acceptation des certificats d'assurance". Les critères et la documentation pour l'acceptation des assureurs et des certificats d'assurance ont également été modifiés et étendus. 

Approbation d'une brochure de renseignements sur la Convention d'Athènes

Le Comité a approuvé le texte d'une brochure de renseignements sur la Convention d'Athènes de 2002 relative au transport par mer de passagers et de leurs bagages. La brochure est destinée à servir de guide aux demandeurs d'indemnisation en cas de mort ou de lésions corporelles d'un passager, ou en cas de perte ou de dommages survenus aux bagages ou aux véhicules durant le transport par mer en vertu du Protocole.  La brochure sera disponible sur le site Web de l'OMI, avec des mises à jour régulières effectuées par le Secrétariat de l'OMI, le cas échéant. 

Les brochures de renseignements actuellement disponibles en ligne sont les suivantes :

Approbation des mesures visant à évaluer s'il est nécessaire de modifier les limites de responsabilité

Le Comité juridique traite des questions liées à la responsabilité et à l'indemnisation en cas de dommages causés par les navires, tels que la pollution. 

Le Comité a approuvé les méthodes suivantes visant à évaluer s'il est nécessaire de modifier les limites de responsabilité : 

  • la méthode de collecte visant à recueillir et à notifier les données relatives à l'expérience acquise en matière d'événements et aux dommages résultant de ces derniers ; et 
  • la méthode d'évaluation de la fluctuation de la valeur des monnaies.

Ces méthodes seront diffusées sous couvert d'une annexe à une circulaire LEG. Les travaux au titre de ce résultat sont achevés.

Feuille de route à suivre pour traiter les questions relatives aux navires de surface autonomes

Le Comité a approuvé une feuille de route pour traiter les questions juridiques relatives aux navires de surface autonomes - des navires de commerce qui, à divers degrés, peuvent être exploités sans interaction humaine. 

Dans le cadre de la feuille de route, le Comité devrait : 

  • LEG 112 (printemps 2025) : examiner le texte définitif du recueil de règles non obligatoires applicables aux navires de surface autonomes et examiner s'il est nécessaire d'apporter des modifications aux instruments relevant de la compétence du Comité juridique ou d'élaborer des interprétations de ces instruments, compte tenu des résultats des travaux du Groupe de travail mixte sur les navires de surface autonomes et de ceux du MSC et du Comité FAL ; examiner les propositions visant à élaborer des directives relatives à l'application des instruments relevant de la compétence du Comité juridique dans le cadre de l'exploitation des navires de surface autonomes. 
  • LEG 113 (printemps 2026) : examiner le texte approuvé du recueil de règles obligatoires applicables aux navires de surface autonomes et examiner s'il est nécessaire d'apporter des modifications aux instruments relevant de la compétence du Comité juridique ou d'élaborer des interprétations de ces instruments.
  • LEG 114 (printemps 2027) : adopter ou approuver les modifications à apporter aux instruments relevant de la compétence du Comité juridique ou les interprétations de ces instruments.

Le Comité a approuvé le rapport du Groupe de travail conjoint MSC/LEG/FAL sur les navires de surface autonomes (MASS-JWG), qui a tenu sa deuxième session en avril 2023.  

Le Comité a soutenu les mesures décrites dans le rapport du MASS-JWG, en approuvant les éléments clés relatifs rôle et responsabilités du capitaine du navire de surface autonome et de son équipage et des centres d'exploitation à distance. Parmi celles-ci, le Groupe de travail MASS-JWG a convenu de ce qui suit :  

  • une personne assumant le rôle de capitaine devrait être chargée d'exploiter le navire de surface autonome, indépendamment de son mode d'exploitation ou de son degré ou niveau d'autonomie ; 
  • il n'était pas forcément nécessaire que le capitaine soit présent à bord du navire de surface autonome, en fonction de la technologie utilisée à bord et de la présence humaine à bord, le cas échéant ;  
  • indépendamment du mode d'exploitation ou du degré ou niveau d'autonomie du navire de surface autonome, le capitaine devrait disposer des moyens nécessaires pour intervenir en cas de besoin ;
  • un seul capitaine devrait être responsable d'un navire de surface autonome à la fois, bien que plusieurs capitaines pourraient être responsables d'un seul et même navire de surface autonome au cours d'un même voyage, sous certaines conditions ; et
  • un examen détaillé est nécessaire sur les conditions en vertu desquelles l'exploitation de plusieurs navires de surface autonomes pourrait être confiée à un seul et même capitaine. 

La troisième réunion du MASS-JWG aura lieu du 8 au 10 mai 2024. 

Facilitation de l'entrée en vigueur du Protocole SNPD de 2010

Le Comité s'est félicité des progrès réalisés en vue de l'entrée en vigueur de la Convention internationale de 2010 sur la responsabilité et l'indemnisation pour les dommages liés au transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses (Convention SNPD de 2010). Le Comité a noté qu'il ne suffisait que quatre autres États ayant le volume requis de cargaisons donnant lieu à contribution ratifient le Protocole SNPD de 2010 ou y adhèrent pour que la Convention entre en vigueur, et que, partant, sa date d'entrée en vigueur s'était considérablement rapprochée. 

Le Comité a noté que la France avait déposé un instrument de ratification en octobre 2023 et la Slovaquie en novembre 2023, ce qui portait le nombre d'États contractants à huit. Cinq de ces États contractants représentaient chacun plus de 2 millions d'unités de jauge brute

La Convention SNPD est la dernière grande convention de l'OMI sur la responsabilité à entrer en vigueur.  Il est essentiel de veiller à ce que les personnes touchées par des événements de mer mettant en cause des substances nocives et potentiellement dangereuses transportées par des navires aient accès à un régime de responsabilité et d'indemnisation complet et international. Ceci est particulièrement important étant donné les quantités croissantes de produits chimiques et de nouveaux combustibles transportés en vrac dans les navires.

Un atelier sur la Convention SNPD se tiendra les 1er et 2 mai au Siège de l'OMI, à l'invitation des Fonds internationaux d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL).

Piraterie et vols à main armée à l'encontre des navires 

Le Comité a pris note des principaux développements dans les questions juridiques liées à la piraterie et aux vols à main armée à l'encontre des navires depuis la session précédente (LEG 110).  Des propositions concernant le programme de travail du Comité ainsi que des mesures urgentes pour lutter les actes de piraterie somaliens dans le golfe d'Aden ont été discutées.  

Le Comité a noté que le Comité de la sécurité maritime était l'organe de l'OMI principalement chargé d'examiner les questions relatives à la sûreté maritime, mais que le Comité juridique avait un rôle à jouer dans l'examen des questions juridiques qui y étaient liées. Le Comité a noté qu'il était favorable à la présentation de propositions concrètes sur ces questions lors du LEG 112, avec la possibilité d'élaborer un nouveau résultat. 

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