L’inclusion des émissions provenant des transports maritimes internationaux dans le Système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'Union européenne (SCEQE) pourrait compromettre les efforts déployés à l’échelle internationale.
Le Secrétaire général de l'Organisation maritime internationale (OMI), M. Kitack Lim, a écrit aux principaux représentants européens pour leur faire part de ses préoccupations concernant le fait que l'inclusion des transports maritimes dans le Système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'Union européenne (SCEQE) pourrait compromettre les efforts déployés à l'échelle internationale pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) provenant des navires.
Dans une lettre adressée à Martin Schulz (Président du Parlement européen), Jean-Claude Juncker (Président de la Commission européenne) et Donald Tusk (Président du Conseil européen), M. Lim a reconnu la politique ambitieuse de l'UE en matière de réduction des émissions et la volonté des États membres de poursuivre les progrès réalisés à ce jour. Le Secrétaire général a toutefois mis en garde quant à l'extension du SCEQE aux navires.
« Je crains qu'une décision finale visant à étendre le SCEQE aux émissions provenant du secteur maritime ne soit prématurée et n'ait de graves conséquences sur les travaux menés par l'OMI pour réduire les émissions de gaz à effet de serre provenant des transports maritimes internationaux. Inclure les émissions provenant des navires dans le SCEQE risque clairement de compromettre les efforts déployés à l'échelle internationale dans ce domaine » , a-t-il déclaré.
Cette lettre fait suite à une décision prise par la commission de l'environnement du Parlement européen, le 16 décembre 2016, pour que les émissions provenant des navires soient incluses dans le SCEQE à partir de 2023, si l'OMI n'adopte aucune autre mesure de réduction des émissions de GES provenant des transports maritimes internationaux d'ici 2021.
L'Organisation maritime internationale (OMI) est l'institution spécialisée des Nations Unies chargée d'assurer la sécurité et la sûreté des transports maritimes internationaux et de prévenir la pollution de l'air et des mers par les navires. Les efforts qu'elle déploie pour réduire les émissions de GES provenant du secteur maritime ont atteint un stade avancé. En 2011, l'OMI est devenue le premier organisme international à adopter des mesures obligatoires en matière de rendement énergétique pour un secteur industriel tout entier, avec un ensemble de prescriptions techniques et opérationnelles applicables aux navires existants et neufs. Ces mêmes prescriptions sont entrées en vigueur en 2013.
Au mois d'octobre 2016, l'Organisation a adopté un système de collecte des données relatives à la consommation de fuel-oil des navires, lequel deviendra obligatoire et sera applicable à l'échelle internationale. Ce nouveau système, qui constitue le premier palier d'un processus en trois étapes, permettra de déterminer si des mesures supplémentaires sont nécessaires pour améliorer le rendement énergétique des navires et lutter contre les émissions de gaz à effet de serre provenant des transports maritimes internationaux. Si tel est le cas, d'autres options stratégiques seront alors examinées.
L'OMI a également approuvé une « feuille de route » pour l'élaboration d'une stratégie globale concernant la réduction des émissions de GES provenant des navires, laquelle anticipe l'adoption d'une stratégie initiale en 2018.
Ces mesures ont été approuvées par consensus par les États Membres de l'OMI, parmi lesquels se trouvent des États membres de l'Union européenne. Dans sa lettre, M. Lim a expliqué qu'il ne s'agissait pas uniquement de mettre l'accent sur le rôle de l'OMI en tant qu'organisme mondial chargé d'élaborer et de faire appliquer des prescriptions pour les transports maritimes internationaux, mais également de réaffirmer le fait que l'Organisation est le seul organe compétent pour mener à bien ces travaux et permettre la coopération politique nécessaire de tous les gouvernements représentés en son sein, dont font partie les États membres de l'UE. « Une telle coopération politique est primordiale si nous souhaitons nous assurer que tous les pays agiront de concert pour faire en sorte que personne ne soit laissé pour compte » , a-t-il ajouté.
Le Secrétaire général a également tenu à préciser que, selon lui, toute initiative régionale ou unilatérale compromettant ou entrant en conflit avec les actions prises en considération et délibérées par la communauté internationale au sein de l'OMI menacerait la confiance accordée à l'échelle mondiale au système de réglementation cohérent et uniforme qu'elle a mis au point. Toute initiative régionale ou unilatérale, a-t-il écrit, entraverait les objectifs de la communauté internationale dans son ensemble pour réduire les émissions de GES provenant des transports maritimes internationaux et serait en désaccord avec les objectifs fondamentaux de l'Accord de Paris.
En raison du caractère global du secteur et de la difficulté d'imputer les émissions d'un navire à un État en particulier, l'Accord de Paris de 2015 ne fait pas mention des émissions provenant des transports maritimes internationaux. Toutefois, comme l'a souligné M. Lim, les travaux menés par l'OMI pour contrôler les émissions de GES montrent que l'Organisation prend des mesures fortes. Par le biais d'une coopération entre ses États Membres, dont font partie plusieurs États de l'UE, l'OMI continue de progresser en direction d'une solution partagée par l'ensemble des acteurs internationaux.
Une décision prise par le Conseil de l'OMI au début du mois de décembre 2016 a permis l'organisation de deux réunions supplémentaires du Groupe de travail du Comité de la protection du milieu marin (MEPC) sur la réduction des émissions de GES provenant des navires au cours de l'année 2017 – la première étant prévue du 26 au 30 juin – ce qui permettra d'avancer sur la question. De plus, cette décision illustre à quel point cette question est essentielle et urgente pour l'OMI. En parallèle, l'Organisation poursuivra ses efforts visant à fournir une assistance aux pays en développement dans ce domaine, avec la conduite de grands projets de renforcement des capacités pour le rendement énergétique des navires.